Post-doctorat « Développement d’un jumeau numérique de prédiction du mouvement des animaux marins »

Les écosystèmes côtiers sont très productifs et concentrent des habitats essentiels pour de nombreuses espèces marines, notamment des zones d’alimentation, de nourriceries, de reproduction et de corridors migratoires. La qualité de ces habitats conditionne le renouvellement et la dynamique des populations marines et, plus largement, la productivité des écosystèmes côtiers. Cependant, le fonctionnement de ces écosystèmes est susceptible d’être profondément et durablement impacté par les effets cumulés du changement climatique (e.g. hausse des température, acidification, stratification de la colonne d’eau) et des activités anthropiques croissantes en zone littorale (e.g. trafic maritime, la pêche, extraction de granulats marins, pollutions et infrastructures éoliennes).   

Compte tenu de l’impact croissant et rapide de ces perturbations anthropiques, il devient essentiel de faciliter le dialogue entre les parties prenantes (instances publiques, scientifiques, gestionnaires, conservateurs et acteurs socio-économiques) afin de favoriser le développement durable des activités maritimes et la protection de l’écosystème marin. Dans ce contexte, la gestion des écosystèmes doit s’appuyer sur des systèmes d’aide à la décision facilitant la mise en place de mesures de gestion et de planification spatial de l’espace maritime. Les jumeaux numériques représentent une approche innovante pour répondre à cet enjeu. Ils reposent sur un couplage en continu entre un système réel et sa représentation virtuelle. L’état du système réel, renseigné par des données collectées, alimente le modèle, qui peut alors corriger ses prédictions, simuler différents scénarios et fournir des outils d’aide à la décision proactive. En écologie, le développement de tels systèmes reste encore limité en raison de leur complexité et nécessite une étroite collaboration entre biologistes et informaticiens.

En milieu marin, le suivi du déplacement des animaux est rendu possible grâce au biologging, qui consiste à équiper les animaux de dispositifs électroniques enregistrant en continu des données (i.e. positions satellites, profils de plongée, accélération tridimensionnelle, variables océanographiques, paramètres physiologiques). Ces données renseignent sur les déplacements des animaux et leurs réponses aux conditions environnementales. La miniaturisation de ces dispositifs entraine une augmentation du volume et de la diversité des données collectées, posant des défis analytiques nécessitant une collaboration entre biologistes et informaticiens.

L’objectif de ce projet est de développer un jumeau numérique de suivi des populations marines côtières par l’ingestion de données de biologging dans une plateforme numérique (Urban Coastal Lab La Rochelle, UCLR) afin de comprendre et prédire les variations spatiotemporelles d’utilisation des habitats de la faune marine en environnement côtier anthropisé. Ce projet développera des outils de simulations avancés, basés sur l’intelligence artificielle. Le projet se focalisera sur le cas d’étude du phoque gris (Halichoerus grypus) pour lequel des suivis à long-terme sont réalisés en Manche et en Mer d’Iroise par La Rochelle Université (Pelagis/CEBC). La perte d’habitats liée au changement climatique ou aux activités anthropiques (notamment la pêche et le trafic maritime) pourrait avoir un impact direct sur la dynamique des populations de phoques en modifiant l’efficacité de recherche alimentaire, les schémas de déplacements, le succès reproducteur ou la survie des jeunes. Le jumeau numérique développé dans le cadre de ce postdoctorat permettra d’explorer la réponse du phoque gris à ces perturbations et d’évaluer les conséquences de différents scénarios futurs.

Laboratoire impliqué

Fondé en 1993, le Laboratoire Informatique, Image et Interaction (L3i - EA 2118) est le laboratoire de recherche du département des Sciences du Numérique de l’Université de La Rochelle. Il compte 98 membres travaillant dans les domaines de l’informatique, de l’image et de l’interaction. En particulier, l’équipe Image et Contenu s’intéresse à l’analyse de contenus visuels et vidéo depuis la création du laboratoire, et s’est récemment concentrée sur le développement d’approches en intelligence artificielle pour analyser le comportement des animaux marins, afin de mieux comprendre l’évolution de leur environnement.

Description du poste

Le/la postdoctorant(e) sera chargé(e) du développement de l’infrastructure de simulation du jumeau numérique. Les données de biologging étant multimodales (natures et fréquences d’acquisition différentes), des méthodes avancées basées sur l’intelligence artificielle sont nécessaires à la mise en place d’un tel outil. En particulier, il s’agira de :

Contextualiser les données de mouvements avec les données environnementales (en mer et potentiellement à terre) afin de simuler les trajectoires « possibles » de phoques en fonction des conditions rencontrées. Plusieurs modèles d’intelligence artificielle générative pourront être développés et comparés (e.g. Conditional Generative Adversarial Network, Transformer).   Simuler un grand nombre de trajectoires « possibles » à partir de ces modèles afin de générer des cartes de distribution spatiale des habitats potentiels et de leur recouvrement avec les activités anthropiques (e.g. trafic maritime, pêche professionnelle). Des trajectoires seront également simulées selon différents scénarios climatiques pour identifier de possibles déplacements ou pertes d’habitats. Intégrer ces simulations dans la plateforme UCLR (Urban Coastal Lab La Rochelle) afin de faciliter la visualisation des habitats sous différents scénarios. Plus d’informations sur l’UCLR : https://www.univ-larochelle.fr/actualites/urban-and-coastal-lab-la-rochelle-uclr/

Il est attendu que le/la candidat(e) propose d’autres approches basées sur l’intelligence artificielle afin de généraliser la méthode à d’autres type de données de biologging afin d’appliquer ce jumeau numérique à d’autres espèces de poissons, oiseaux et mammifères marins.

Les résultats feront l’objet de publications dans des revues internationales et de présentations lors de conférences scientifiques.

Dr. Marine Gonse et Dr. Mickael Coustaty (L3I) assureront l’encadrement du postdoctorant(e). Des interactions sont à prévoir avec Dr. Cécile Vincent (Observatoire Pelagis), experte du marquage et suivi télémétrique des phoques gris.

Le/la candidat(e) devra détenir un doctorat en informatique, IA ou machine learning, avec des applications au traitement de données multimodales. Le/la candidat(e) devra démontrer sa capacité à mener des recherches de manière autonome et à mener un projet au sein d’un groupe de recherche pluridisciplinaire. Ce projet se situant à l’interface entre l’informatique et l’écologie marine, il/elle devra être capable de travailler en collaborations avec des informaticiens et des biologistes/écologues. 

Compétences techniques :

• Analyses de données multimodales, spatiales et de séries temporelles
• Fortes compétences en programmation sous différents langages (Python, Matlab etc.)
• Langue anglaise (lu, écrit, parlé) et française (optionnel)
• Intérêt pour les sciences environnementales
• Expérience dans le domaine des jumeaux numériques (optionnel)

Compétences opérationnelles :

• Rigueur, autonomie, esprit d’initiative
• Capacité au travail en équipe pluridisciplinaire
• Capacité organisationnelle et respect des deadlines
• Capacité de communication et de vulgarisation à des publics variés
• Esprit critique et curiosité
• Gestion de projet, planification des activités
• Rapport de l’état d’avancement sous forme de notes synthétiques
• Capacités rédactionnelles et oratoires en anglais